Qui est Felix Mendelssohn ?

Quoi de commun entre le Psaume 42 et l’Ouverture du Songe d’une nuit d’été ? Entre les Variations sérieuses et la Symphonie italienne ? Entre la Symphonie « La Réforme » et les Romances sans paroles ? Dans la musique de Mendelssohn (1809-1847), la science du contrepoint et la solennité religieuse côtoient le pétillement, le lyrisme et la légèreté.

Itinéraire d’un enfant prodige

À l’âge de dix-huit ans, ce musicien aussi précoce que sa sœur Fanny avait déjà écrit deux chefs-d’œuvre : l’Octuor à cordes et l’Ouverture du Songe d’une nuit d’été, « ruissellement de jeunesse » dont s’émerveilla Schumann. Formé auprès de Carl Friedrich Zelter, fondateur de la Singakademie berlinoise, le jeune Felix tissa des liens étroits avec le répertoire ancien, qu’il contribua plus tard à diffuser. En 1829, l’exécution sous sa direction de la Passion selon Saint Matthieu de Bach fut un épisode marquant de sa carrière : l’œuvre n’avait jamais été jouée en public depuis la mort de son auteur.

Une œuvre au carrefour des styles

Bach fut d’ailleurs un modèle privilégié pour Mendelssohn, ce dont témoigne, outre les Préludes et fugues pour orgue, une œuvre chorale considérable : deux oratorios achevés, Paulus et Elias, et un grand nombre de motets et de cantates  — dont un Jesu meine Freude. Ces contributions majeures au répertoire sacré du XIXe siècle se doublent d’une œuvre instrumentale incontournable, que ce soit à l’orchestre, au piano, à l’orgue ou en musique de chambre. À la fois compositeur, chef d’orchestre et pédagogue, ouvert sur la culture littéraire et artistique de son temps, Mendelssohn laissa une œuvre radieuse, à la croisée du romantisme et de l’équilibre classique.

 


Sources 

  • Larry Todd, « Mendelssohn (-Bartholdy), (Jacob Ludwig) Felix », Grove Music Online, 2001, consulté le 25 novembre 2023.
  • Brigitte François-Sappey, Felix Mendelssohn. La lumière de son temps, Paris, Fayard, 2008.

 

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Qui est Ludwig van Beethoven ?

Né à Bonn en décembre 1770, Ludwig van Beethoven est forcé dès son plus jeune âge à s’entraîner au piano plusieurs heures par jour. Son père, musicien médiocre, a détecté très tôt le talent de son fils, et est bien décidé à le voir suivre le chemin tracé quinze ans plus tôt par le célèbre Mozart.

Vienne

Beethoven rencontre Mozart lors de son premier voyage à Vienne en 1787. Après une suite de deuils familiaux, il n’y revient qu’en 1792 pour étudier avec Joseph Haydn. Durant ses études dans la ville impériale, il se fait connaître comme pianiste virtuose et improvisateur de génie, avant de publier ses premières compositions.

Révolutions musicales et idéologiques

Inspiré par la Révolution française, Beethoven adopte des idées libérales qui le guideront aussi à travers son approche de la musique. Bousculant les codes musicaux de l’époque, il se détache de ses premières influences, comme Haydn ou Mozart, et innove, notamment avec ses symphonies. Son œuvre représente la transition entre le classicisme et le romantisme.

Surdité

Dès l’âge de 26 ans, Beethoven commence à prendre conscience d’une perte d’audition progressive, qui finit par le laisser complètement sourd. Malgré ce handicap, Beethoven ne cesse jamais de composer : assis par terre devant un piano dont il a scié les pieds, il continue de vivre la musique grâce aux vibrations qu’il ressent à travers le sol.

Fréquemment malade, il finit par s’éteindre à Vienne en 1827. Il laisse derrière lui une musique qui a ouvert la voie à de nombreux autres compositeurs, tels Brahms, Schubert et Wagner.

 

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Qui est Jean-Sébastien Bach ?


Qui est Jean-Sébastien Bach, ce compositeur allemand, né à Eisenach à la fin du XVIIème siècle, mort à Leipzig le 28 juillet 1750, à l’âge de 65 ans ? L’homme aux mille compositions. Bach, le prolifique, le pilier de la tradition musicale baroque !

Son enfance

Dernier de huit enfants, Jean-Sébastien Bach est baptisé dans la tradition luthérienne. Son père est un organiste et un violoniste de talent. Il est élevé par son frère aîné, après la mort de leurs deux parents quand il avait  10 ans. A l’âge de 15 ans, doté d’une bourse, il prend son indépendance en intégrant la manécanterie de Lunebourg. Il y apprendra l’orgue, le clavecin et le violon.

Profession organiste

A 18 ans, il est employé comme violoniste d’un orchestre de chambre, puis accepte un poste d’organiste à Arnstadt, où il se forme à la technique du contrepoint musical. Quatre ans plus tard,  il devient organiste titulaire à Mühlhausen, en Thuringe et y compose sa première cantate. 

De 1708 à 1717, Guillaume II, duc de Saxe-Weimar en fait son organiste et son premier violon soliste. Bach se perfectionne dans l’écriture d’œuvres en  alternance solo-tutti. Appelé à la cour du roi de Pologne à Dresde, il préfère rester auprès du duc de Weimar qui double sa rétribution

Le beau-frère du duc, le prince Léopold d’Anhalt-Köthen, lui propose un poste de maître de chapelle. C’est le  poste le plus prestigieux pour un organiste ; il sera propice à l’écriture des plus grandes œuvres du compositeur, dont les six concertos brandebourgeois. Pourtant, il doit quitter Weimar pour Leipzig, deuxième ville de Saxe, où il devient responsable de formation musicale. Il y séjourne jusqu’à sa mort et y compose sa Passion selon Saint Jean et sa Messe en si mineur. Il perd la vue 5 ans avant sa mort. 

Jean-Sébastien Bach eut  20 enfants de ses deux mariages. Dix moururent en bas-âge, mais quatre de ses fils devinrent compositeurs à leur tour.

 

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Mais qui est Jacques Offenbach ?

Si le nom d’Offenbach sonne familier pour beaucoup, bien peu sont capables de fredonner l’un de ses airs  – au-delà du cercle ésotérique des fanatiques de musique classique. Et pourtant, s’ils ont le malheur de tomber sur un musicien excité de la troupe Oya Kephale qui leur explique qu’il a forcément déjà entendu ça, ils se ravisent et affirment d’un ton assuré « Ah, mais oui, c’est le mec qui a fait le French can-can ! »

 

 

Las, il faut alors entreprendre de leur expliquer que ce n’est pas exactement ça, que le Moulin Rouge a ouvert dix ans après la mort d’Offenbach et que sa vie est loin de se résumer à ces quelques mesures légères et endiablées, qui ont certes fait le tour du monde.

 

 

 

Un enfant prodige

Jakob Offenbach naît en 1819 à Cologne, d’un père musicien et chantre à la synagogue. Il révèle très tôt d’excellentes aptitudes pour la composition et pour la pratique du violon, puis du violoncelle.

Son père lui fait quitter l’Allemagne dans l’espoir de le faire admettre au Conservatoire de Paris. Son talent lui vaut d’être accepté par son directeur, Luigi Cherubini, et ce malgré son jeune âge (14 ans) et sa citoyenneté allemande. Rappelons que Liszt et Franck avaient été refusés peu avant au Conservatoire, du fait de leur citoyenneté étrangère. Il adopte alors le prénom de Jacques, et s’empresse d’achever ses études pour tenter de vivre de sa musique.

De la musique de théâtre à l’opéra-bouffe

Il intègre en 1835 l’Opéra-Comique comme violoncelliste permanent, et il y découvre notamment le théâtre et le développement du répertoire lyrique. Parallèlement, il se produit dans les salons et se fait remarquer par son jeu virtuose.

C’est en 1850 que sa vocation de compositeur d’œuvres lyriques se confirme, lorsqu’il devient directeur musical de la Comédie-Française.

Il écrit ses premières opérettes en 1853 mais, à son grand désarroi, ne parvient pas à les faire jouer à l’Opéra-Comique. C’est alors qu’il crée le Théâtre des Bouffes-Parisiens où il peut librement faire jouer ses compositions. La position astucieuse de ce théâtre, sur l’avenue des Champs-Elysées, lui permet aussi de drainer un public particulier, celui de l’Exposition universelle de 1855. Le succès de ses premières pièces fait grandir sa notoriété, et lui vaudra d’être surnommé par Rossini « le petit Mozart des Champs-Elysées ».

C’est d’ailleurs l’opera-buffa de Rossini qui inspire le nouveau genre qu’Offenbach entend développer après celui de l’opérette : l’opéra-bouffe. Orphée aux enfers, « opéra-bouffon », fait figure d’œuvre pionnière de ce genre et lui assure un succès progressif. C’est notamment dans cette œuvre que l’on retrouve le fameux galop infernal, repris en can‑can par la suite.

 

 

Divertir le Second empire … et le reste du monde

Après avoir quitté la direction du Théâtre des Bouffes-Parisiens en 1862, Offenbach est très sollicité par les grandes salles parisiennes : au Théâtre des Variétés sont créées La Belle Hélène, Barbe-Bleue, La Grande Duchesse de Gérolstein, La Périchole, et Les Brigands, et à celui du Palais-Royal, La Vie parisienne. Ces œuvres, qui dépeignent, non sans ironie, les grandes heures du Second Empire, suscitent un engouement croissant, et marquent un véritable apogée dans la carrière d’Offenbach.

Il retrouve également la fosse de l’Opéra-Comique, mais cette fois-ci à la direction, en y créant plusieurs œuvres comme Robinson Crusoé et Vert-Vert. La popularité qu’Offenbach acquiert avec ses opéras-bouffes et ses mélodies gagne le reste de l’Europe, en particulier Vienne, où il produit systématiquement une version allemande de ses œuvres. Sa renommée s’étend aussi outre-Atlantique, et lui vaudra une tournée mémorable aux États-Unis en 1876.

Une dernière décennie en dents de scie

Cet heureux épisode intervient cependant au cours d’une période contrastée pour Offenbach. Les années 1870 marquent en effet un tournant dans la vie politique et culturelle en France : le Second Empire prend fin à la suite de la défaite de Sedan. Un esprit revanchard, galvanisé par la perte de l’Alsace et de la Moselle, gagne toutes les couches de la société française. La Prusse et ses ressortissants sont pris pour cibles, et Offenbach n’est pas épargné. Malgré la Légion d’Honneur et la nationalité française qu’il a obtenues quelques années plus tôt, il se sent persona non grata et quitte Paris, puis la France. À son retour en 1873, il devient directeur du Théâtre de la Gaîté, où il crée ses premiers opéras-fééries (Le Roi Carotte, Le Voyage dans la Lune).

Il meurt en 1880, quelques mois avant la création des Contes d’Hoffmann, qui deviendra l’un des opéras français les plus joués, après Carmen de Bizet. Auteur d’une centaine d’œuvres lyriques, Offenbach s’est indéniablement imposé comme une figure incontournable du Second Empire puis comme un compositeur de référence dans l’histoire de la musique.

Dates-clefs

  • 1819 : naissance à Cologne (Allemagne).
  • 1833 : admission au Conservatoire de Paris, dans la classe de violoncelle.
  • 1850 : nomination comme directeur musical de la Comédie Française.
  • 1855 : création de son propre théâtre, les Bouffes-Parisiens, sur l’avenue des Champs-Elysées.
  • 1858 : création d’Orphée aux enfers, premier opéra-bouffe.
  • 1860 : obtention de la nationalité française.
  • 1873 : prise de fonctions comme directeur du théâtre de la Gaîté.
  • 1876 : tournée aux Etats-Unis.
  • 1880 : décès à Paris.
  • 1881 : première représentation des Contes d’Hoffmann.

 

Sources

 

 

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Qui est César Franck ?

Un concert d’Oya Kephale mi-décembre 2022. Et un certain César Franck né le 10 décembre 1822…

Notre troupe pouvait-elle manquer une telle occasion d’honorer celui qui fut à la fois belge et français, compositeur et professeur, pianiste et organiste, et qui a profondément marqué la période romantique française? C’est donc avec un grand plaisir que nous renouvelons cette année la formule du concert-hommage, déjà mise en œuvre en décembre 2021 avec Saint-Saëns. Nous espérons à travers cet hommage participer à faire connaître le grand musicien qu’était César Franck.

De Liège à Paris, une enfance prometteuse

Une éducation musicale rigoureuse en Belgique

Né à Liège en 1822, César Franck entame l’apprentissage de la musique sous l’impulsion d’un père exigeant et mélomane. Il fréquente le Conservatoire royal à partir de 1831 et révèle d’excellentes aptitudes pour le piano puis pour la composition. 

Une formation d’excellence à Paris

La famille Franck s’installe à Paris au milieu des années 1830. A cette époque, l’engouement pour la musique, les concerts et l’opéra sont en plein essor dans la capitale française. Le jeune César, qui n’a pas encore 13 ans, peut alors bénéficier de l’instruction de musiciens prestigieux, tel qu’Antoine Reicha. Cet épisode n’est pas sans rappeler la vie de Jacques Offenbach : le compositeur fétiche d’Oya Kephale fut en effet lui-même envoyé à Paris à l’âge de 14 ans pour y parfaire sa formation musicale.

Compositeur reconnu et organiste virtuose

Une composition innovante : le développement de la forme cyclique

Après plusieurs succès lors de concerts au piano, le génie de César Franck se révèle aussi dans la composition, tout particulièrement pour la musique de chambre.  Son talent est perçu dès son premier opus, les Trios concertants pour piano, violon et violoncelle (Op. 1), qui sont publiés avec le soutien de plusieurs musiciens, dont Liszt, Meyerbeer, Chopin ou encore Donizetti.

Dans cette œuvre, le style de Franck se distingue par la maîtrise de la « forme cyclique », procédé consistant en la reprise répétée d’un thème selon différentes formes tout au long d’un morceau. Cette technique est aussi particulièrement perceptible dans plusieurs autres  de ses compositions telles que Prélude, choral et fugue pour piano (1884).

 

Du piano à l’orgue

Mais César Franck se fait aussi remarquer par ses talents d’organiste. Après avoir été titulaire dans plusieurs églises parisiennes, il aborde une nouvelle période de sa vie en 1859, en rejoignant  la tribune de Sainte-Clotilde. Outre ses improvisations brillantes, il compose plusieurs œuvres qui font aujourd’hui figure de références dans le répertoire sacré : notons par exemple Prélude, fugue et variation (Opus 18), dans Six pièces pour grand orgue (1860-1863), les Sept paroles du Christ en Croix (1859), et la Messe à trois voix (1860), à laquelle  sera adjoint le célèbre motet Panis Angelicus (Op. 12, 1861). Mais sa pièce sacrée la plus fameuse reste à ce jour Les Béatitudes, oratorio composé entre 1869 et 1879.

 

La transmission d’un patrimoine musical “français”

La Société Nationale de Musique

L’année 1871 marque un tournant dans la vie de Franck :  la défaite française contre la Prusse provoque un élan patriotique dans la population, y compris parmi les musiciens. Un mouvement s’organise alors autour de Gabriel Fauré, Henri Duparc et César Franck, afin de renouveler la musique française face à l’essor de la musique allemande et de l’opéra.

César Franck consolide ce mouvement avec la création de la Société Nationale de Musique, qu’il cofonde aux côtés de Camille Saint-Saëns et Romain Bussine, un mois après la fin de la guerre. Le but de cette Société est d’encourager la création d’œuvres d’une nouvelle garde de musiciens français, et de les promouvoir lors de concerts réguliers. Franck devient l’un des maîtres de la musique française les plus reconnus – alors même qu’il n’est naturalisé qu’en 1873 ! La Société Nationale de Musique sera propice à la composition de grandes pièces de musique de chambre parmi ses plus fameuses (Quintette pour piano et cordes, Sonate pour violon et piano, le Quatuor à cordes), mais aussi de pièces symphoniques comme Le Chasseur maudit.

 

Franck professeur

Parallèlement à son engagement dans la Société Nationale de Musique, Franck transmet aussi ses savoirs par un autre biais : en 1872, il devient professeur d’orgue au Conservatoire de Paris. Il y forme de brillants élèves promis à un grand avenir, tels que Vincent d’Indy, Ernest Chausson, Henri Duparc ou encore Louis Vierne. La “bande à Franck” voit le jour. La plupart de ses membres seront aussi adhérents de la Société Nationale de Musique 

Le dévouement de Franck pour l’enseignement et la transmission se perpétue jusqu’à sa mort soudaine en 1890, des suites d’un accident de fiacre.

Le monument à César Franck, square Sainte-Clotilde
Cl. Braun, Clément et Cie, d’après le groupe d’Alfred Lenoir, 1920
Source gallica.bnf.fr / BnF

Les grandes dates de la vie de César Franck

  • 1822 : naissance à Liège, 8 ans avant l’indépendance de la Belgique
  • 1835 : installation à Paris, enseignement d’Antoine Reicha au Conservatoire
  • 1859 : organiste titulaire de l’église Sainte-Clotilde à Paris
  • 1872 : professeur d’orgue au Conservatoire de Paris
  • 1873 : obtention de la nationalité française
  • 1885 : remise de la Légion d’Honneur
  • 1886 : président de la Société Nationale de Musique (SNM)
  • 1890 : décès à Paris

 

Sources

 

 

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Qui est Gounod ?

Charles Gounod (1818-1893) est principalement connu pour son opéra Faust et pour un Ave Maria composé sur le prélude du Clavier bien tempéré de Jean-Sébastien Bach. S’il est vrai que l’éclat de ces succès fait aujourd’hui un peu d’ombre au restant de son œuvre, rappelons qu’en son temps, le compositeur comptait parmi les plus respectés et les plus prolifiques de sa génération. Il a laissé à la postérité pas moins de douze opéras et vingt-et-une messes.

 

Une enfance musicale

Les parents de Charles Gounod vivent tous les deux dans le milieu artistique parisien. Son père travaille comme peintre et graveur au service de la royauté, comme son père et son grand-père avant lui. Sa mère joue du piano et a un don pour les arts plastiques.

On ne tarde pas à s’apercevoir que l’enfant est doué également pour la musique et pour le dessin1. À la mort de son père, Gounod n’a que cinq ans. Mme Gounod, pour subvenir aux besoins de la famille, ouvre une classe de piano.

Sur les conseils de sa mère, le jeune musicien entreprend l’étude de l’harmonie et du contrepoint en suivant les cours particuliers d’Antoine Reicha2. Il développe en parallèle une belle voix de ténor et acquiert de l’habileté dans la maîtrise du clavier.

À la mort de Reicha, Gounod rejoint la classe de fugue et de contrepoint de Fromental Halévy, au conservatoire de Paris, et la classe de composition tenue successivement par Henri Berton, Le Sueur et Ferdinando Paër. Le compositeur qu’il admire le plus, à l’instar de Le Sueur, est Gluck, le compositeur d’opéra du XVIIIe siècle.

Académie de France à Rome

Gounod se présente au prix de Rome à dix-neuf ans, mais n’obtient que la seconde place. Ce n’est que deux ans plus tard, en 1839, qu’il remporte le Grand Prix, avec la cantate Fernand. En janvier 1840, il rejoint la Villa Médicis, en plein cœur de Rome, lieu de résidence des élèves de l’Académie de France3. Il y restera deux ans et fera la connaissance du peintre Dominique Ingres.

La ville aux sept collines constitue un cadre idéal pour les jeunes étudiants sensibles aux Beaux-Arts.

La Villa Médicis, lieu de résidence des élèves de l’Académie de France à Rome

Lors d’un concert à la Chapelle Sixtine, le compositeur est vivement ému par la musique de Palestrina (Nigra Sum sed formosa). Selon lui, une telle science du contrepoint ne peut trouver sa source que dans la foi pure.

“La musique palestrinienne semble être une traduction chantée du vaste poème de Michel-Ange, et j’inclinerais à croire que les deux maîtres s’éclairent, pour l’intelligence, d’une lumière mutuelle”

 

Charles Gounod a de la religion. Le père dominicain Lacordaire, alors retiré à Rome, exerce sur lui une telle influence que sa mère envisage pour lui la voie ecclésiastique.

À Rome, Charles Gounod découvre la poésie de Lamartine et approfondit sa lecture de l’incontournable Faust de Goethe. La pièce emblématique du Romantisme devient son livre de chevet.

C’est lors de son expérience romaine que Gounod jette les bases de son esthétique. Il se dit tiraillé entre des idéaux de beauté, de vérité et de chrétienté d’une part, et d’autre part la tentation de l’égoïsme et de l’artifice.

Comme la plupart des lauréats du Prix de Rome, Gounod passe sa troisième année en Autriche et en Allemagne. La visite de Vienne, ville de Mozart et Beethoven, lui procure une grande émotion. Il confesse à Ingres “je ne sais quelle impérieuse influence l’idée de Beethoven a toujours eu sur moi.” Son voyage germanique se poursuit jusqu’à Leipzig, où il rend visite à Mendelssohn. Le jeune compositeur joue pour lui l’Écossaise, dans une exécution privée de l’orchestre du Gewandhaus.

L’influence de Mendelssohn est sensible notamment dans le scherzo de sa Petite symphonie pour vents.

 

Le retour à Paris

En 1843, Charles Gounod revient à Paris, où il obtient par l’intermédiaire de sa mère le poste de maître de chapelle à l’église du Séminaire des Missions étrangères. Ce lieu constitue un laboratoire pour ses pièces chorales sacrées.

Pendant un temps, il souhaite devenir prêtre : il entrera au séminaire de Saint-Sulpice en 1847, pour finalement le quitter au bout d’un an. Cependant, il témoignera tout au long de sa vie d’une foi inquiète et renouvelée.

Dans les années 1850, il rejoint le cercle de la mezzo-soprano Pauline Viardot. Celle-ci obtient que l’on confie à Gounod l’écriture d’un premier opéra, Sapho. La pièce, créée dans la salle Le Peletier, ne rencontre pas un grand succès.

Le chemin vers la renommée

Invité par Pierre-Joseph Zimmermann4 a jouer pour l’un de ses salons, si caractéristiques du XIXe siècle, Gounod improvise une mélodie en surimpression du prélude du Clavier Bien Tempéré de Bach. Il est vraisemblable que Zimmermann ait eu l’idée de faire le relevé de cette mélodie et, en 1859, d’y ajouter les paroles latines de la prière à Marie – ce sera le fameux Ave Maria de Gounod.

Gounod épouse Anna Zimmermann en 1852, et obtient la direction de l’Orphéon de Paris. Ce réseau de sociétés chorales, dont les membres sont issus des classes laborieuses et de la petite bourgeoisie, constitue un instrument de la politique égalitaire du second Empire.

Gounod occupe le poste pendant huit ans et compose pour l’Orphéon plusieurs chants patriotiques.

En 1856 et 1857, il entreprend l’écriture de son opéra Faust. Au moment où il y met la dernière main, on joue encore au théâtre de la Porte Saint Martin le Faust et Marguerite de Carré. Léon Carvalho, directeur du tout récent Théâtre-Lyrique, juge trop périlleux de produire simultanément deux Faust rivaux. Gounod et lui décident de travailler plutôt sur Le médecin malgré lui. Ce sera seulement en 1858 que Carvalho acceptera de produire Faust et que Gounod terminera son opéra.

La Nuit de Walpurgis, lors de la création de Faust au Théâtre-Lyrique
Dessin de Cambon et Thiery

Carvalho inaugure la nouvelle salle du Théâtre-Lyrique (place du Châtelet, aujourd’hui Théâtre de la Ville) avec Faust en 1862. C’est un succès.

En 1867, outre-Rhin, Wagner qualifie le Faust de Gounod de “faible pastiche français d’un monument littéraire allemand”. Le sentiment de Gounod à son égard, plutôt positif jusque-là, est naturellement refroidi par ce jugement lapidaire.

En 1868, l’opéra de Paris demande à Gounod de composer un ballet pour son Faust. Réticent, le compositeur exprime au directeur la “fatigue mentale” que lui procure cette adjonction.

Encouragé par le succès de ses opéras Faust et Le médecin malgré lui, il compose cinq autres opéras dans les huit années qui suivent, tous avec les librettistes Barbier et Carré.

Parmi les plus connus, citons La reine de Saba (1862), Mireille (1864) et Roméo et Juliette (1867).

3 ans en Angleterre

En septembre 70, la guerre est aux portes de Paris. Le moral au plus bas, Charles Gounod quitte la France et trouve refuge en Angleterre avec sa famille.

L’Énigme, de Gustave Doré, 1871, issu du triptyque Souvenirs de 1870

Lettre à Edouard Dubuffet 8 novembre 1870

Voilà le résultat actuel du Progrès humain. Si c’est aux fruits qu’on juge l’arbre, et si, comme cela est incontestable, la valeur des causes doit se mesurer à celle des effets, il faut reconnaître que, pour en arriver où nous sommes, la sagesse humaine a dû faire bien fausse route.

Il compose en 1871 une pièce nommée Gallia, portant le sous-titre motet-lamentation. Cette œuvre décrit la désolation de Jérusalem après la conquête de la cité par Nabuchodonosor :

“L’idée m’est venue de représenter la France telle qu’elle était… outragée, violée par l’insolence et la brutalité de son ennemi”. – pour mieux exhorter ensuite ses habitants à la conversion : “Jérusalem, reviens vers le Seigneur ton Dieu”.

L’œuvre est créée le 1er mai 1871 au Royal Albert Hall et remporte un beau succès.

Gounod propose à la soprano Georgina Weldon, qu’il a rencontrée en février, de tenir la partie soliste de Gallia pour la création française. L’œuvre est programmée à l’Opéra Comique, à Notre-Dame et au Conservatoire de Paris.

En novembre, ils retournent à Londres et Mrs. Weldon invite Gounod à s’installer chez elle et son époux, à Tavistock House. Elle a pour souhait de bâtir un orphelinat aménagé pour la musique, et endosse le rôle d’impresario de Gounod.

En France, la presse critique sévèrement l’exil du compositeur, et l’hospitalité de Georgina Weldon suscite toutes sortes de rumeurs. Gounod comme Mrs. Weldon seront victimes de charges violentes, dénoncées des deux côtés comme d’affreuses calomnies.

La période anglaise est prolifique : Gounod compose des pièces pour une société chorale fondée par Mrs. Weldon, une musique de scène pour le Jeanne d’Arc de Barbier, des chansons anglaises, d’autres italiennes, des esquisses pour un Opéra Comique autour de George Dandin, la Messe brève pour les morts et la Missa angeli custodes… Il poursuit également l’écriture d’un opéra dont les germes ont été semés lors d’un voyage à Rome en 1868 : Polyeucte, en mémoire du martyr chrétien du IIIe siècle.

Retour en France

A son retour à Paris, il rencontre des difficultés à récupérer le manuscrit de Polyeucte. Mrs. Weldon retient les documents et tient à s’occuper de la vente de l’opéra. L’affaire est portée devant la justice anglaise, qui donne raison à Mrs. Weldon.

Gounod entreprend malgré tout de réécrire l’opéra de mémoire. Il l’a presque terminé quand il reçoit finalement la musique originale en septembre 1875 : Mrs. Weldon la lui transmet par l’intermédiaire de son ami Oscar Comettant.

Dans la dernière partie de sa vie, Gounod compose beaucoup de musique religieuse, notamment un grand nombre de messes et deux oratorios : La Rédemption (1882) et Mors et vita (1885).

Gounod s’éteint le 18 octobre 1893, ce sera la dernière modulation qui se résout sur la tonique du concert éternel 5.

Il bénéficie de funérailles nationales en l’église de la Madeleine, avec du plain-chant pour toute musique, selon ses volontés.

Les grandes dates de la vie de Charles Gounod

  • 1818 : naissance à Paris
  • 1839 : Grand Prix de Rome avec la cantate Fernand
  • 1840-1843 : Pensionnaire de l’Académie de France à la Villa Médicis
  • 1842 : voyage en Allemagne et Autriche
  • 1843 : maître de chapelle aux Missions étrangères de Paris
  • 1850 : rencontre la mezzo-soprano Pauline Viardot
  • 1851 : création de son opéra Sapho à la salle Le Peletier
  • 1852 : mariage avec Anna Zimmermann
  • 1852-1860 : préside l’Orphéon de la Ville de Paris
  • 1859 : première de Faust au Théâtre Lyrique
  • 1859 : création de l’Ave Maria avec la collaboration de Pierre-Joseph Zimmermann
  • 1859-1867 : compositions de 5 opéras, dont Mireille (1864) et Roméo et Juliette (1867)
  • 1870-1873 : exil en Angleterre. Rencontre de Georgina Weldon. Composition de Gallia (1871)
  • 1893 : mort à Saint-Cloud

 

1 Ingres, qui fait la connaissance de Gounod à la Villa Médicis, considère que ce dernier aurait pu concourir pour le prix de Rome, également dans le domaine des Beaux-Arts.

2 Antoine Reicha est également professeur au conservatoire de Paris, où il enseigne notamment à César Franck.

3 Dans la catégorie de la composition musicale, le prix de Rome offre à ses lauréats deux années d’études à Rome et une troisième, soit en Allemagne, soit en France. Mis en place par Colbert, le prix de Rome a disparu suite aux événements de mai 68.

4 Compositeur, professeur de piano au conservatoire de Paris et futur beau-père de Gounod

5 Lettre du 13 avril 1867 à la Duchesse de Colonna

 

Sources

  • Richard Wagner, Deutsche Kunst und deutsche Politik, 1867
  • Georgina Weldon, Mon orphelinat et Gounod en Angleterre, 1875
  • Charles Gounod, Mémoires d’un artiste, Calmann Lévy, 1896
  • Richard Boursy, The Mystique of the Sistine Chapel Choir in the Romantic Era, University of California Press, 1993
  • Steven Huebner, Gounod, Grove, 2001
  • Julie Anne Sadie, Georgina Weldon, Grove, 2001
  • Gérard Condé, Charles Gounod, biographie et catalogue complet, Fayard, 2009

 

 

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Fantaisie sur « Greensleeves » de Ralph Vaughan Williams

Ralph Vaughan Williams, compositeur britannique, dont on fête cette année le 50e anniversaire de la mort, est un des compositeurs anglais les plus importants de la première moitié du XXe siècle, tant par la profusion de son œuvre que par la qualité de son interprétation.

Entre 1897 et 1906, il fait ses études à Londres où il rencontre Gustav Holst avec qui il devient ami, puis à Cambridge et enfin en Allemagne où il suit l’enseignement de Max Bruch. Il fait la connaissance de Claude Debussy lors d’un voyage en France et de Maurice Ravel avec qui il se liera d’amitié. Très sensible aux chants populaires, dès son plus jeune âge, il les recueille, les édite et saisit toutes les occasions possibles pour les interpréter.

Ralph Vaughan Williams, compose grand nombre d’œuvres : 9 symphonies, des concertos, des ballets, des œuvres chorales et des opéras. C’est de l’introduction du 3ème acte de l’un d’eux, Sir John in Love, basé sur une nouvelle de Shakespeare, qu’est extraite la Fantaisie sur « Greensleeves », arrangée en 1934 par Ralph Greaves pour cordes, harpes et 2 flûtes ad libitum.

Cette Fantaisie se divise en trois parties. Une première exposition de la célèbre mélodie anglaise « Greensleeves » dont l’origine demeure assez incertaine et qui daterait du XVIe siècle, précède la partie centrale où est présenté aux violoncelles et alti un thème de danse populaire. A celui-ci succède, après une transition de la flûte solo, le retour de l’exposition.

Universellement connu, Ralph Vaughan Williams décède le 26 août 1958 à Londres. Ses cendres reposent à l’abbaye de Westminster, près de celles de son aîné, Henry Purcell.

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